Le commissaire Joss est douloureusement affecté par la mort de son collègue Gouvion, survenue au cours d'un hold-up. Pour venger son ami, il invente le coup du siècle : il met deux bandes sur la même affaire et les laisse s'entretuer. Une fois le Milieu parisien épuré, Joss partira à la retraite, le coeur apaisé.
L'avis du cinéphile : Véritable patron du cinéma français dont l'aura mythologique est déjà largement éprouvée en cette fin des années 1960, Jean Gabin recherche de nouveaux horizons. Le succès inouï qu'il rencontre depuis de nombreuses années (et -presque- jamais démenti) commence à fléchir lentement. Consolidant cette période à l'aide de polars utra-solides et charpentés selon une habitude bien ancrée depuis le milieu des années 1950, Gabin enchaine Du rififi à Paname (thriller international haut en couleur) et Le soleil des voyous (belle variation mélancolique autour de Mélodie en sous-sol) afin de rester au sommet. Malgré tout, l'érosion est là, sensible, ce qui pousse l'acteur à prendre quelques risques mesurés.
Travaillant pour la seule et unique fois avec Georges Lautner, et rompant ainsi ses habitudes de collaborations régulières avec d'autres équipes, Gabin fonce tête baissée dans ce projet aux allures de Ne nous fachons pas sur un mode froid et cynique, violent et dramatique. Le film en partage les couleurs saturées, le kitch savamment exploité, la tonalité Pop et les délires graphiques en fonction d'une mise en scène délibérément démonstrative. Mais Le pacha rejette toute volonté humoristique et plonge sa star dans un étrange dédale visuel aux excès dosés et à l'ambiance paradoxalement austère. Un film sur l'ambiguïté, les cons et le sentiment de vieillir. Avec ce polar hard boiled à la fois très ramassé et cousu main, Jean Gabin démontre son éternelle capacité à s'adapter et dans le même temps fait son entrée dans la dernière ligne droite de sa carrière. Une période où il alignera encore les succès populaires légendaires (Le clan des siciliens, La Horse, Deux hommes dans la ville), mais lors de laquelle il usera également son image jusqu'à la corde au fil de personnages dont les illusions envolées feront d'eux des martyrs de l'insouciante bêtise de notre monde contemporain.
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